Lorsque le soleil décline à l'horizon, la nuit emporte tout avec elle [Clara Silvas/Hoshi Aoki]

Hoshi avançait le long des allées du cimetière. Les tombes se dressaient par centaines, envahissant son horizon tandis que le crépuscule se propageait de plus en plus. Un vent frais fit frissonner Hoshi, la nuit tombait. 
Il n'avait pas froid, ce frissonnement était plutôt le reflet d'un dégoût profond encré dans son âme qui resurgissait lorsqu'il s'autorisait à penser à sa condition... Un vampire !

Un être abject, sans coeur... Un monstre abominable et suceur de sang.
Hoshi accéléra le pas, ressentant un besoin imminent d'extérioriser la colère qu'il avait enfouie au plus profond de son être, là où personne ne pouvait la saisir, ni même l'atteindre. Il n'était pas sûr que parler d'âme soit encore juste concernant un vampire. Non, il était ridicule de penser ainsi, les vampires n'ont pas d'âme, n'est-ce pas ?

Un rire franchit ses lèvres, froid, méprisant envers lui-même.
Aujourd'hui, Hoshi se détestait plus encore qu'il ne détestait celui qui lui avait volé sa vie.
En tant que jeune vampire, Hoshi repensait souvent à son ancienne vie, sa vie de mortel, qui l'aurait largement satisfait s'il n'avait pas été forcé de devenir ce qu'il était à présent.
Il soupira, profondément las de ses réflexions. Il ne pouvais hélas guère s'empêcher de retourner mille fois ses regrets et ses souhaits, comme dans l'espoir qu'un jour, Dieu,la vie, ou la chance lui donne ce qu'il convoitait si fortement.

Mais Dieu n'a aucune prise sur les mortels, encore moins sur les vampires, créatures maudites.
La chance ? Hoshi n'y avait jamais cru.
Et il continuait à marcher, infatigable, errant parmi les nombreuses stèles des êtres partis dans l'au-delà, si tant est qu'il existe, d'ailleurs.
Enterrés, les êtres décédés, qui avaient eux, vécu une vie humaine, pas forcément longue il fallait en convenir, mais humaine. Et c'était ce qu'il aurait préféré, reposer comme ces mortels, enfermés dans les ténèbres d'où personne ne revient... D'où aucun mortel ne revient, évidemment.
Une larme roula sur sa joue, presque invisible, tandis qu'il songeait encore qu'il était bel et bien mort, mais revenu ainsi. S'étant perdu à jamais, et pis encore, ayant perdu les êtres chers qu'il aimait. Ses parents, son meilleur ami, et tous ses amis et sa famille.

Hoshi, exténué d'être toujours ainsi assailli par ses pensées aussi noir que le doux Enfer dans lequel il était plongé à présent : la Nuit.
Il chercha une étoile dans le ciel, juste une seule lui aurait suffit à se sentir rassuré, à espérer l'arrivée d'un espoir. 
Non, le ciel était d'un noir d'encre si profond, tel une mer tourmentée.
Il soupira avant de s'adosser contre une pierre tombale. Ses yeux se fermèrent et il s'offrit à l'obscurité la plus totale tandis qu'il sombrait dans un vide intérieur apaisant, laissant ses tourments s'en aller avec la brise, au loin, et créer les nuages du ciel....

Clara était entrée dans le cimetière. Elle venait faire son deuil et voir la dernière demeure de son sauveur. Il avait laissé sa vie pour la sauvé et puis il était mort dans se bras. Elle avait pleuré deux jours durant. Aujourd'hui elle ne pleurait pas car elle ne voulait pas ou plutôt qu'elle n'en ressentait pas encore l'envie. Il y longtemps, elle avait versée toutes les larmes de son corps comme une cascade. 

Elle était vêtue de noir, une longue robe couleur de cendre avec des taillons aiguilles couleur corbeau et ses cheveux châtains attachaient en chignon par un bracelet doré. La reine marchait lentement et majestueusement à travers les tombes avec un bouquet de fleurs blanches entre les mains. Aucune larmes illuminaient ses yeux aux couleurs de sang. Elle  finit par atteindre la dite tombe. Le dernier endroit au son cher ami reposé parmi les insectes et les plantes, à milieux lieux en dessous d'elle.

 Son altesse tomba à genou devant le monument sacré. Elle pleurait toutes les dernières larmes de son corps qui avaient échappées à la grande mousson des deux derniers jours. Elle pleurait jusqu'à l'illumination du ciel noir par les étoiles en guise de réconfort. Elle enleva son bracelet dorée qui tenait ses cheveux. Ils tombèrent en un immense ruisseau sur ses épaules. Elle regarda le nom sur la tombe: Helfi Théodeur. Un nom barbare mais qui lui manquait, qu'elle ne pourrait plus jamais prononcer. Puis elle déclara, après avoir verser toutes sa peine comme un torrent sur la tombe en pierre:
- Mon ami, je suis venus ici, pour te déposer ses fleurs que tu aimais tant. J'ai détaché mes cheveux vue que tu n'as jamais vraiment aimé les voir attaché. Je me souviens que je les attaché pour d'énervé mais maintenant le destin ou un certain Dieu t'a enlevé à moi. Je dois faire mon deuil et pour cela je dois te quitter. Le destin funeste s’acharne sur nous et je te serais jamais assez reconnaissante du sacrifice que tu as fait.
Maintenant je te dis adieu et merci


La jeune souveraine se releva et partit majestueusement comme elle était venu. Elle passa entre les tombes sans même y faire attention en essuyant ses yeux aux couleur d'un beau couché de soleil. Elle finit par arriver à un grand arbre où une pierre tomba était dressée. Peut-être celle du constructeur ou créateur de ce magnifique monument pour les défunts. Devant la pierre, elle remarqua un beau jeune homme. Il était adossé et endormit. Elle eut un petit sourire et s'approcha doucement de cet homme. Elle s'arrêta à quelques mètres de lui et s’essaya. Maintenant un petit sourire pourpre éclairait son visage triste qui avait été si rayonnant avant. Cet homme venait d'être son soleil dans cette abîme noire, dans l’enfer de la solitude et la tristesse.

Alors qu'Hoshi avait fermé les yeux quelques minutes, attentif au lourd silence qui s'était emparé des lieux, il ressentit une présence... Ses sens de Vampire lui permettaient certes beaucoup plus d’acuité et d'ouïe qu'auparavant, si c'était bel et bien une qualité toutefois. Il se concentra, tentant de percevoir d'autres éléments. S'il était vampire, il fallait bien que cela puisse lui servir à quelque chose en définitive. Il la localisa mentalement, elle devait se trouver à trois allées de lui ; son isolement cérébral momentané lui avait fait perdre quelques minutes, il aurait dû être capable de la détecter bien avant. A moins qu'elle soit elle-même dotée de quelques pouvoirs. Et puis quoi ? Peu lui importait, tout le monde avait le droit de errer sans but réel, ou pour se recueillir sur la tombe d'un être aimé et regretté.

Hoshi laissa sa tête partir en arrière, en contact direct avec le froid pénétrant du marbre sombre de la pierre tombale. Il allait retomber dans un pseudo-sommeil sans rêve lorsqu'il sentit l'inconnu(e) approcher. Instinctivement, ses yeux azur s'ouvrirent, pour se poser sur l'inconnue. Une jeune femme aux yeux d'un pourpre aussi intense que le sang.
Il jugea par son apparence qu'elle devait être quelqu'un d'important, étant donné sa tenue.
Il ignorait comment on accueillait généralement les rares visiteurs arpentant les cimetières à des heures si tardives. De plus, Hoshi n'était pas de ceux que l'on peut qualifier de bavards.
Il parlait souvent assez peu, se réservant au strict minimum "vital" nécessaire.
Vital était un bien grand mot pour parler d'un vampire néanmoins.

Il se contenta de la regarder un instant, fixant ses yeux un instant dans ceux de celle qui lui faisait face, à présent assise par terre.
Il baissa les yeux, se contentant de reporter son attention sur l'herbe humide qui couvrait le sol, à perte de vue. 
Il se demandait pourquoi une telle femme s'abaissait ainsi près du gamin solitaire et désemparé qu'il était. Elle devait être très agréable, autrement elle n'aurait jamais agi de la sorte.
Il leva les yeux, la voyant un peu sourire, jugea plus convenable de lui sourire à son tour.

Devait-il la saluer, ou lui laisser prendre la parole ? Toutes ces convenances normalement acquises n'étaient plus vraiment encrées dans l'esprit d'Hoshi. Il se contentait de saluts polis, assez distants et plutôt évasifs. Il n'avait pas encore cette aisance qu'ont en général, les vampires centenaires ou millénaires qui, assez habitués à leur condition de vampire, agissent selon les codes ancestraux.

Après quelques minutes, il se demanda encore comment l'accueillir, il voulut la saluer comme il se doit mais, à la place, dit : "Mademoiselle... Vous ne devriez pas vous asseoir près de moi, l'herbe est mouillée, votre robe..." Il se questionna un instant, ne sachant même pas pourquoi il lui disait une telle chose. En général, on dit "bonsoir" ou bien on se salue avant d'attendre que l'autre fasse de même.

Et bien, non, Hoshi baissa les yeux, les rivant à nouveau sur la verdure. "Je ne suis pas digne de votre attention."

Ses mots n'étaient que murmures, aussi fluides que le souffle du vent, qui faisait un peu osciller les branches des arbres et qui charriait leurs deux chevelures. 
Dans la noirceur de la nuit, deux êtres seuls fendaient le silence des morts. La pleine lune nimbait les longs cheveux de la jeune femme d'une lueur ambre, assez énigmatique. 
Le ciel, qui était tout à l'heure dépourvu d'étoiles, en laissait à présent apparaître plusieurs, dont une plus vive que les autres. Perdu dans cette contemplation, il songea assez futilement que le destin lui avait peu-être apporté cette lueur de chance tant convoitée...

La jeune souveraine s'était assise devant le jeune homme et le regardait. Il leva la tête et ouvrir les yeux. Il avait deux saphirs à la place des yeux. Pendants un petit instant, ils plongèrent leurs deux regards dans leurs yeux respectivement. Clara était charmait et bouche bée devant la beauté de cet homme. Puis le jeune homme baissa la tête. La jeune vampire eut un petit sourire en voyant son étrange interlocuteur ne rien dire. Elle leva les yeux au ciel et regarda le grand chêne sous lequel ils étaient maintenant assis.

Les étoiles brillaient comme des boules dorées suspendues dans un sapin de noël. L’épais feuillage de l'arbre n'était en faite qu'illusion. Il paraissait épais mais ne l'était point comme l'était Clara. Elle était forte mais intérieurement tout n'était d'illusion. Elle eut un sourire pourpre illuminant de tous ses feux son visage rosé. La jeune reine remarqua que le jeune homme l'observait avec un petit sourire. Il ne savait que dire... cela devrait être dû à leurs rangs. Vampire et Vampire de sang pur... plutôt un humain vampirisé en face d'un vampire de race pur. Il devrait être gène ou perdu dans ses rêves d'enfant tendre.

Un silence épais s'installa sur les deux amants de la nuit. Ils ne se disaient rien mais se regarder. Parfois dans les yeux où saphir et rubis se mélangaient pour ne former plus qu'un ou, parfois elle le regardait et lui regardait l'herbe tendre. Enfin il décida de briser le masque:
"Mademoiselle... Vous ne devriez pas vous asseoir près de moi, l'herbe est mouillée, votre robe..."

Puis l'épais voile de solitude et de silence se réinstalla avant d'être recoupé à nouveau par le petit homme qui lâcha dans un murmure à peine audible:
"Je ne suis pas digne de votre attention."


L'ange démoniaque le regarda, avec un petit sourire rouge se dessinant sur ses lèvres vermeille, mais déjà le petit vampire regardait de nouveau le sol humide, gainait pas ses mots, se trouvant stupide. Elle répondit doucement et calmement comme une mère à son enfant chéri:
- Ne vous en faite pas pour ma robe mais merci. Et puis le noir ne vas pas, j'ai décidé de changer de couleur et de la jeter. Vous ne trouver pas? Le noir est signe de deuil, il faut allait de l'avant et tourner le dos au passé pour vivre... vivre sa vie et l’accueillir pour pourvoir la mordre à pleine dent. Il faut vivre pour nous et ceux que nous aimons encore vivant et non pour les morts ou un passé perdu.

Elle regarda le jeune homme avant de reprendre avec une gaieté nouvelle:
- Vous n'êtes pas indigne de moi, pourquoi dites-vous une chose aussi horrible? Nous ne nous connaissons même pas. Je suis Clara Silvas et vous?

Elle regarda l'homme en face de lui, la lune maîtresse de la nuit lui éclatait le visage. Un visage jeune avec des traits que la vieillesse n'avait pas encore marqué. Il devait avoir son âge et était vraiment très beau mais une chose chez lui n'allait pas..... le tristesse, la solitude... tout ses sentiments étaient marqués au fer rouge sur son beau visage enfantin. La jeune reine eut un pincement au cœur en voyant ce triste spectacle. Il venait de lui rendre une joie passée, elle devrait tout faire pour qu'il lui esquissa au moins un sourire.

Lorsque la jeune femme s'adressa à lui, il s'étonna de sa gentillesse, et du naturel avec lequel elle s'adressait à lui. C'était presque du jamais vu... Une vampire au sang pur, s'adressant à un jeune humain vampirisé comme lui... Ses paroles le firent sourire, l'invitant à relever les yeux vers elle, les encrant à nouveau dans les siens.
"Je m'appelle Hoshi Aoki... Je suis votre obligé." chuchota t'il.

"Si je puis me permettre de donner mon avis, il est peut-être vrai qu'une robe noire est un peu triste. Le noir vous va bien, mais peut-être, une couleur plus claire..." 

Il n'en revenait pas lui même... Lui, Hoshi Aoki, discutait avec une sang-pure dans un cimetière, de la couleur d'une robe. C'était absolument impensable. Il en aurait presque rit dans d'autres circonstances.
"Il faut se tourner vers l'avenir, il est vrai..." Ajouta t'il doucement, songeant que c'était ce qu'il s’évertuait à faire depuis quelques années, sans y parvenir totalement.

Les rubis étincelants du regard de la jeune femme, captivaient son attention. Ils lui rappelaient... Le regard de son meilleur ami. Cette couleur qui l'avait intriguée son enfance durant, tandis qu'il restait en compagnie de son meilleur ami. Telle la rougeur d'un soleil crépusculaire des pays du Sud.
Telle la beauté d'un feu de cheminée les soirs d'hiver, dans lequel viennent immanquablement se perdre les yeux nostalgiques , comme s'ils cherchaient, dans la profondeur des flammes, une réponse tant espérée. 

Hoshi se força à sortir de ses pensées, et offrit un sourire à la jeune femme, qui semblait détailler son visage pour une raison qui lui était encore inconnue.

A nouveau, son regard se fixa sur les millions d'étoiles de la voie lactée qui s'étendaient à n'en plus finir sur ce ciel d'un noir d'encre aussi profond que la couleur de la robe de Clara.
Passant du ciel aux yeux de son interlocutrice, Hoshi remarqua avec une sorte d'émotion indéfinissable, une similitude entre les étoiles et ses yeux. Car, dans les méandres de ses yeux, se mêlaient quelques lueurs divines, ça et là, ainsi que les vestiges du Paradis perdu. Elle trônait, inaltérable dans sa conservation d'Ange déchu qu'elle était ; un Vampire avec toute la beauté et la fascination qu'elle occasionnait, dans sa grandeur infinie, aussi étendue que le ciel qui les enveloppaient à présent, les condamnant à la Nuit.

Hoshi avait tout oublié, l'espace d'un instant, s'autorisant à retrouver des émotions humaines, ainsi qu'il le faisait par moments. La nostalgie, la tristesse, mais aussi le bonheur d'une compagnie rare.

Mais le sentiment qui dominait à présent son être, celui même qui s'emparait de son cœur (si toutefois l'on considérait qu'il lui en restât un) n'était aucun de ces trois états.

Ce dernier était plus fort, rejetant la peine qu'il avait, et enfouissant la mélancolie persistante dans les tréfonds de l'obscure brune nocturne, oui... C'était l'Espoir.